lundi 29 mai 2017

Les sherpas de l'Himalaya ont développé des capacités physiques hors du commun

sherpa_himalaya_etude.jpg

Sur les hauteurs de l'Himalaya, presque au sommet du mont Everest, le peuple des sherpas a adopté, au cours des siècles, un métabolisme beaucoup plus résistant que la normale.

Pour la plupart des alpinistes, l’ascension du mont Everest est la plus harassante, la plus mortelle des aventures. En plus du terrain abrupt et pentu, des températures glaciales et de la météo capricieuse, l’air est si épais, l’oxygène est si rare, que le corps peut tout simplement flancher. Sauf si vous êtes un sherpa.
Les membres de ce groupe ethnique népalais ont évolué, génération après génération, pour apprendre à résister à cette atmosphère. Leur métabolisme s’est même adapté au manque d’oxygène et ils sont particulièrement performants lorsqu’il s’agit de produire de l’énergie dans les hautes altitudes, selon une nouvelle étude publiée lundi 22 mai dans Proceedings of the National Academy of Sciences, la revue scientifique publiant les comptes-rendus de l’Académie américaine des sciences.

De nouvelles façons d'aider les maladies

Métaphoriquement, les cellules des sherpas peuvent être comparées aux voitures économes en carburant, capables de rouler plus longtemps, sur des distances plus longues, en consommant moins. Grâce à ces découvertes sur le métabolisme des sherpas, les scientifiques pensent que nous pourrions trouver de nouvelles façons d’aider les personnes souffrant d’hypoxie.
Cette maladie est une inadéquation entre les besoins tissulaires en oxygène et les apports que le corps peut fournir. Autrement dit, il n’y a pas assez d’oxygène dans le sang. "En comprenant comment les sherpas sont capables de survivre avec de si petites doses d’oxygène, nous pouvons trouver des pistes pour aider ceux qui souffrent d’un grand manque d’oxygène et aider au développement de meilleurs traitements", affirme Michael Grocott, coauteur de l’étude et professeur à l’université de Southampton en Angleterre, dans un communiqué de presse.
Michael Grocott est le président de Xtreme Everest, une initiative vieille de dix ans, créée par des docteurs, des infirmiers et des scientifiques pour étudier comment le corps humain réagit à l’altitude extrême de l’Himalaya. Leur but ultime : trouver des solutions aux problèmes respiratoires ou aux affections comme l’hypoxie en étudiant comment le corps se transforme à haute altitude.

Comment le corps fonctionne face au manque d’oxygène

Avec ses 8 848 mètres de haut, le mont Everest est la plus haute montage de la chaîne et le camp de base, situé sur le versant sud, se situe à 5 300 mètres d’altitude. Ce qui est déjà largement suffisant pour causer des difficultés aux personnes non préparées
Les alpinistes peuvent lutter contre ce phénomène en transposant des réserves d’oxygène (...), les sherpas n'en ont pas besoin.
À ces altitudes où l’oxygène est rare, c’est comme si le corps faisait des heures sup’ pour être sûr que le cerveau et l’ensemble des membres reçoivent leur part d’air respirable. Pour s’adapter, il va produire des globules rouges supplémentaires, ce qui aura pour conséquence de réduire l’arrivée du sang aux organes et de réduire les vaisseaux sanguins.
Les alpinistes peuvent lutter contre ce phénomène en transportant des réserves d’oxygène et en prenant des pauses régulières pour que le corps s’adapte. Les sherpas n’en ont pas besoin. Ils produisent moins de globules rouges dans les hautes altitudes et plus d’oxyde nitrique, une molécule qui permet d’ouvrir les vaisseaux sanguins et assure une bonne circulation du sang.

Des capacités transmises de générations en générations

Cette condition physique remarquable a forcément fait d’eux le peuple de guides parfaits à travers les hautes montagnes de l’Himalaya, malgré les conditions de travail difficiles et le manque de moyens financiers.
Pour réaliser l’étude publiée dans la revue de l’Académie américaine des sciences, une équipe de chercheurs affiliés à Xtreme Everest et issus de l’université de Cambridge a suivi quinze sherpas durant plusieurs jours.
Les scientifiques ont pris des échantillons de leur sang à eux à trois reprises : avant de quitter l’Angleterre, à leur arrivée au camp de base de l’Everest et après deux mois de vie dans ce même camp. Ensuite, ils ont comparé ces échantillons avec ceux pris sur les sherpas à Katmandou, la capital du Népal, et au niveau du camp de base.
sherpa2.jpg
Peu importe l’altitude : les mitochondries – cette partie des cellules humaines qui respire pour générer de l’énergie – sont plus efficaces sur les sherpas. Ce qui laisse à penser qu’ils sont nés avec ces aptitudes biologiques. "Les sherpas ont passé des milliers d’années à vivre en haute altitude, donc il n’est pas surprenant qu’ils soient naturellement devenus plus efficients concernant la gestion de l’oxygène et la production de l’énergie", explique Andrew Murray, coauteur de l’étude et professeur à l’université de Cambridge.
Bien que les "corps normaux" s’adaptent peu à peu à la vie en haute altitude, nous ne pourrons jamais concurrencer les sherpas.
– Adapté par Benjamin Bruel. Retrouvez l'article original sur Mashable.
sherpa3.jpg